L'infirmière qui travaille en EHPAD

C'est l'histoire d'un monsieur de 90 ans qui est entré récemment en EHPAD.

Un matin en distribuant les médicaments, je lui demande s'il a passé une bonne nuit, si tout va bien (il paraissait renfermé et d'humeur morose). Il me répond qu'il se sent bien trop seul. Sa famille ne vient pas assez souvent et ils l'ont abandonné là me dit il.

J'essaye d'aller un peu plus loin dans la conversation. Je lui dis que ce n'est pas facile ces différences de génération et aussi que ma génération est souvent trop occupée et pas très fidèle avec ses ainés.

Il me répond que, quand même, son fils et son petit-fils habitent à quelques rues seulement. Son petit-fils est venu avec son arrière-petit-fils une fois et il a eu à peine l'occasion de lui parler, de rentrer en contact avec lui. Il aurait voulu le connaitre ce petit bonhomme. Mais sa propre famille le considère peu et ne le respecte pas autant qu'il le voudrait. Ils ne se soucient plus de ce qu'il pense, de ce qu'il vit. En tout cas, lui le ressent comme ça. Et il pleure.

Je lui dis que nous sommes là pour lui. Et je lui suggère d'appeler sa famille pour reprendre un peu contact. Il me remercie mais il ne souhaite pas faire le premier pas. Ce n'est pas dans ses habitudes d'appeler. Il ne se sent pas à l'aise avec le téléphone.

Je lui prends les mains un moment et je lui dis: "à plus tard, n'oubliez pas que nous sommes là et n'hésitez pas à venir nous voir si ça ne va pas".

 Il faut que je continue ma tournée de médicaments... Mais ça me fait mal au coeur de le laisser dans sa chambre.

Un peu plus tard je le croise dans les couloirs. Je lui souris mais lui semble un peu ailleurs, encore bien triste.